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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK


fortune, avec d’autant plus de raison que c’est la vraie saison des récoltes pour des femmes de cette espèce. Elle est aussi jolie que spirituelle et inconséquente. Enveloppée avec Contarino dans la dernière conspiration, elle a pensé perdre la vie ; en ce moment, elle sort des plombs par le crédit du rival de Contarino, son amant actuel. Le premier la perdait, le second la sauve. Salut, messieurs ! nous ne pouvons vous en dire davantage ; il est défendu à Venise de parler des affaires de l’État ; peut-être même en avons-nous trop dit…

Et ils disparurent.

— Eh bien, mon prince, dit le comte triomphant, vous voyez bien que vous êtes dans l’erreur ; votre femme se serait-elle mêlée de conspiration ? S’échapperait-elle ainsi avec des jeunes gens ? Quels que soient les torts que vous lui avez prêtés, vous conviendrez qu’elle est pourtant incapable de ceux-ci.

— Ce dont je conviens, mon ami, dit impétueusement Frédéric, c’est que la femme que nous venons de voir est Adélaïde ; ce dont je conviens encore mieux, c’est qu’elle m’est infidèle, c’est que je l’adore et que je la hais tout à la fois. Et ce que j’ajoute à cela, c’est qu’elle fait bien de me fuir, car je la poignarderais tout en tombant à