Page:Sade - Cahiers personnels, Adélaïde de Brunswick, Pauvert, 1966.djvu/159

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
139
ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK

— N’en doutez pas : j’ai maintenant acquis des connaissances assez étendues sur son caractère pour vous assurer de sa tendresse.

— Enfin, que vous a-t-elle dit ?

— Que vous étiez l’objet de ses affections les plus chères, mais qu’elle n’osait manquer à ses devoirs.

— Ah ! ses devoirs sont de m’aimer, dit le marquis avec transport. Ai-je consulté les miens, quand mon âme s’exalta dans la sienne ? Et l’amour admet-il d’autres devoirs que ceux que sa main nous impose ? J’adore Adélaïde ; je veux l’idolâtrer toute ma vie ; je lui sacrifierai jusqu’à mon sang, si elle l’exige : elle l’anime, il est à elle. Mais qu’un peu plus de force de sa part paie au moins mon ivresse, et qu’elle me console de ce que je souffre par l’espoir d’adoucir mes tourments, si quelque jour elle le peut.

— Il faudrait, ce me semble, convenir d’une façon de se voir.

— Que de dangers pour elle dans ce plan téméraire !

— Les moyens les plus violents sont ceux qui plaisent le plus à l’amour, et l’expérience nous prouve que ce sont toujours les plus sûrs : me chargez-vous d’y travailler ?

— Ah ! mon ami, je vous devrai la vie !…