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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK

— Et voilà ce qui me désespère… Comment vaincre des difficultés de ce genre ? Vous connaissez assez mon caractère pour être bien persuadé que je ne me permettrai jamais aucune des mesures qui pourraient assurer mon bonheur aux dépens de celui de mon seigneur et maître. Honoré de sa confiance et des principaux emplois de sa cour, je lui suis dévoué pour la vie, et n’acquitterai point par de l’ingratitude tout ce qu’il a fait pour moi… Mais pourquoi m’a-t-il envoyé remplir auprès de son épouse les formalités d’un hymen que l’usage prescrit entre souverains ? Pourquoi m’a-t-il donné la douleur de l’envisager un instant comme ma femme, tandis que mon devoir me prescrivait de la lui conduire à ce titre ? Me croyait-il donc insensible au point d’admirer tant de beautés sans en devenir moi-même idolâtre ?

— Assurément, dit ici le comte en interrompant Louis ; tout malheur qui résulterait de cette imprudence de sa part devrait retomber sur lui seul, et vous seriez bientôt excusé par sa conduite irréfléchie.

— Ah ! quelle qu’elle puisse être, rien ne me fera manquer aux lois de l’honneur ! Ces lois gravées dans l’âme d’un véritable Saxon ne s’enfreignent jamais. Nos ancêtres ont bravé