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MARQUIS DE SADE — AN VII.
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Et ces propos, ce coquin-là les a tenus, les a criés dans mon canton ; il les a publiés à la police ; il les a tenus à tous les députés de ma connaissance et de mes deux départements……


Le marquis menace l’avocat, pour leur commun malheur, de se jeter dans les bras de son fils. (16 germinal, an VII).

C’est pour la dernière fois, citoyen, que je me permettrai de vous peindre l’horreur de ma situation. Elle est telle qu’il ne m’est absolument plus possible d’y tenir. Voilà deux mois que vous avez ma surveillance, et quelque promesse que vous m’ayez faite après son obtention, je vois que je n’en suis pas plus avancé et que vous ne daignez seulement pas m’informer de l’effet de cette faveur sur le département des Bouches-du-Rhône. Je le répète, c’est donc pour la dernière fois que je vous prie de m’envoyer des fonds sur le champ, et si, courrier par courrier, la réponse à celle-ci n’en contient pas, je me jette dans les bras de mon fils et lui donne mon bien pour une pension. Ce sera sans doute un grand malheur pour moi, mais ce ne sera pas le seul que j’aurai dû à votre impardonnable et cruelle apathie. Il était écrit dans le livre du destin que votre barbare paresse me ferait mourir et je dois, puisque je le peux, au moins ralentir l’effet de ce terrible horoscope. L’abandon dans lequel vous me laissez est sans exemple, mais en voilà le dernier reproche. Dieu veuille que mon fils se conduise bien avec vous, quand il sera maître ! Tout ce que je puis vous dire, c’est que j’en doute, et la connaissance que j’ai de ses projets sur tout cela ne me paraît point agréable pour vous, mais vous le voulez, vous m’y contraignez, vous n’aurez donc à vous en prendre qu’à vous……


Le marquis accuse l’avocat d’être insensible, pusillanime, hypocrite, paresseux et lâche. (27 messidor, an VII).

……Aucune raison que celle de votre exécrable et criminelle paresse ne vous empêche d’aller à Aix et, ou vous êtes un homme perfide, ou vous devez y aller. C’est à faire lever le séquestre par le département des Bouches-du-Rhône que doivent tendre toutes vos démarches ; vous devez, pour vous y décider, ne cesser d’avoir devant les yeux (et ceci est un fait positif que tout le monde me dit ici) vous devez, dis-je, ne cesser d’avoir devant les yeux que c’est à vous que je dois le malheur où je suis plongé, que c’est par votre faute que je suis resté inscrit sur cette liste, dont il est impossible à présent de se faire rayer ; et ce que je vous dis-là, je vous le ferai lire sur une pièce officielle, signée de sept gens en place. C’est donc à vous à réparer votre abominable, votre infernale, votre criminelle négligence. C’est vous qui me faites perdre mon bien, c’est à vous de me le faire rendre. Voilà la vraie religion, voilà les vraies vertus du chrétien, et non pas les vaines et imbéciles formalités d’une messe et d’un jeûne le vendredi. Mais on a bien raison de dire que ceux qui tiennent à ces bêtises ne sont jamais