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MARQUIS DE SADE — AN V.
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Le marquis a vendu la Coste, mais il craint que l’argent ne soit pas pour lui. (24 vendémiaire).

……Je vous ai fait part que le sous-seing privé, relatif à la vente de la Coste et fait entre M. Rovère et moi, a été réalisé avant-hier vingt-deux vendémiaire en acte par devant notaire, et que c’est maintenant une affaire absolument finie. J’ai appris avec plaisir que M. de Rovère vous conservait la régie de cette terre ; je l’y ai fort excité et l’en ai loué. Vous n’avez qu’un défaut, mon cher Gaufridy, c’est de faire excessivement attendre les rentes des propriétaires et ce défaut, capital pour moi qui suis très près de mes pièces, est de peu d’importance pour un homme aussi riche que M. Rovère.

Il a été fort question, en passant cet acte, des créanciers. On m’a demandé s’ils étaient spécialement hypothéqués sur la Coste ou sur le total de mes biens ; j’ai dit, comme je le crois, qu’ils étaient hypothéqués sur le total et non sur la Coste spécialement ; de ce qu’un homme est accoutumé de recevoir sa rente sur tel ou tel fermier, n’est pas une preuve que son fonds est spécialement hypothéqué sur le fonds régi par ce fermier. Je vous l’ai dit, mon cher Gaufridy, dans le malheureux cas où cela fût, c’est ici où vous pourrez me rendre le plus important service que vous m’ayez rendu de votre vie. N’allez pas, nouvel homme de M. Rovère, me perdre et m’anéantir pour obliger votre nouveau client. Sans doute il ne faut pas que M. Rovère soit exposé à payer deux fois, mais il ne faut pas non plus qu’il paie à d’autres qu’à moi et que je n’aie vendu que pour payer des créanciers…… Si, par des oppositions, M. Rovère vient à me manquer, je n’ai plus comme je vous l’ai déjà dit, qu’à m’aller jeter dans la rivière. Je vous conjure donc (car je sais bien qu’à présent vous ne m’aimez plus) pour que cette affaire réussisse à mon honneur et à mon avantage. Quant à madame de Sade, ses droits sont conservés dans l’acte ; son hypothèque n’est point spéciale, et il a été décidé, en passant l’acte, qu’elle ne pouvait en rien gêner l’opération et qu’elle devait lui être si indifférente qu’à peine valait-il la peine de lui en parler. Je vous exhorte donc à ne lui point écrire……

Rovère me sait par cœur comme me saurait un frère, mon amie, mon fils, vous, etc. Qui l’instruit donc ainsi ? Je l’ignore ; je suis bien sûr que ce n’est pas vous, et vous recommande seulement de maintenir, comme je suis bien sûr que vous le ferez, une balance égale entre ses intérêts et les miens……


Le marquis méprise les plates insolences de Charles Gaufridy et ne veut plus avoir affaire à lui. « Ce 2 janvier (V. S.) ». (12 nivôse, an V).

Le plus souverain mépris, monsieur, est tout ce que je crois devoir aux plates insolences que vous m’adressez. Ce n’est pas à un enfant de votre