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MARQUIS DE SADE — AN III.
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étrangers que j’apprenne cette nouvelle ! Oui, il y a cinq mois que M. de Murs est mort, et vous ne m’en dites rien ; il est mort et c’est moi qui, par la loi, dois en hériter, et vous ne m’en dites rien ! Je sais toute l’histoire de son testament, et ce n’est pas par vous que je la sais. Oh ! mon ami, ce procédé est inconcevable de votre part et je n’y reconnais pas vos sentiments pour moi !

La loi du dix-sept nivôse de l’an II de la république sur le partage des successions casse le testament de M. de Murs et en remet en ma faveur toutes les dispositions. Les citoyennes de Chabrillan ne peuvent hériter comme filles d’émigrés parce qu’elles représentent un émigré ; mais moi, quoique père d’émigré, je ne représente point un émigré et mes droits sont certains. Représentez-vous donc sur le champ pour les faire valoir ; cet héritage m’appartient en entier, et votre maudite négligence, passez-moi le terme, va me le faire perdre.

Est-il possible, grand Dieu, que vous vous soyez endormi sur cet objet ! Pressez-vous, je vous en conjure ; arrivez la loi à la main, et tout est à nous ! Si vous laissez traîner cela, la nation va s’emparer de tout et je n’aurai rien……


Le marquis envoie à Gaufridy la copie d’une lettre que madame de Villeneuve lui a écrite pour lui proposer de louer Mazan et celle de la réponse qu’il a faite à Quinquin.

Copie de la lettre que vient de m’écrire madame de Villeneuve.


Avignon, 24 fluviôse, an III de la R. F.

Cher neveu, je suis sur la fin de mes affaires avec la nation. Quinquin me parle toujours de votre terre de Mazan et de vos besoins. Comme je n’ai pas envie de rester dans cette ville, je désirerais aller rester à Mazan. Si vous voulez me louer toute votre terre, je vous en fais une offre de quinze mille livres pour ma vie durant. Si cette proposition vous convient, vous me le marquerez et les quinze mille livres vous seront comptées à l’instant de ma prise de possession. Je vous prie de me répondre de suite, parce qu’on me propose d’autres effets. Je vous embrasse tendrement.

Signé : Sade Villeneuve……

Copie de ma réponse à Quinquin :


Reconnaissant votre écriture, citoyen, dans la lettre que je viens de recevoir de madame de Villeneuve, en date d’Avignon du vingt-quatre pluviôse, c’est à vous que j’en adresse la réponse, en vous remerciant d’avoir pensé à moi, quoique je ne vous doive pourtant pas grande reconnaissance pour le très mauvais marché dans lequel vous voudriez m’engager et que je suis bien éloigné de faire.