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MARQUIS DE SADE — 1790
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La tante proteste par lettre de la bonté de son cœur, mais elle n’a que faire de ce vieux drôle et s’en débarrasse aussitôt en l’expédiant à Ripert.

M. de Sade apprend de la même dame que son gendre, M. de Raousset, a émigré et que la tête de sa fille baisse. Il veut aussitôt profiter de ce qu’elle est seule pour attaquer cette cousine sur son testament. « On dit, écrit-il à Gaufridy, qu’elle est cousue d’or ; envoyez-moi un peu de cet or-là ! » Il songe un instant à lui dépêcher son chevalier qui va partir pour la Provence, mais on ne pille avec profit que les villes où l’on entre soi-même. Le garçon a d’ailleurs perdu plus que la dame dans la seule victoire qu’il ait remportée sur elle.

Le marquis vient habiter rue Neuve-des-Mathurins, numéro vingt, à la Chaussée-d’Antin. Ce nouveau changement paraît avoir suivi sa rupture avec madame de Fleurieu et préparé son entrée en ménage avec la dame Constance Renelle, femme Quesnet. La maison, qui lui plaît, sera son dernier asile ; son mausolée sera bâti au fond du jardin. On dirait même, à l’entendre, qu’il y est déjà !

Mais il faut de l’argent pour cette installation. Les quartiers, payés en assignats coupés qui perdent cinquante-cinq du mille, sont insuffisants et toujours en retard. Aussi M. de Sade met-il à profit la présence de Reinaud pour obtenir une lettre de crédit sur son frère, banquier à Aix. Cette lettre est sacrée, mais elle n’est qu’à trois mois ; partant M. de Sade se trouve, chaque trimestre, dans l’obligation de la toucher ou de laisser tomber le crédit.

Gaufridy prend prétexte des demandes de meubles qu’on lui envoie pour revenir sur les ravages que mademoiselle de Rousset a faits à la Coste. Sa rancune ne désarme pas. Le marquis s’exprime lui-même sur la morte en termes fort sales : on voit cependant qu’il ne le fait que par complaisance ou par politique.




Madame de Montreuil s’oppose à ce qu’on remette à l’ordre de Malte un mémoire désobligeant pour la mémoire du grand prieur. (30 janvier 1790).

Depuis l’administration qui vous a été confiée, monsieur, sous l’inspection de M. le grand prieur (il y a deux ans et demi, ce me semble), à ma grande satisfaction j’avais perdu de vue toutes les affaires, desquelles je