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CORRESPONDANCE INÉDITE DU MARQUIS DE SADE — 1776
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qu’il veut faire entendre dans un procès. Ce serait vilenie ! La vertu féminine a de ces traits-là, mais elle est rarement constante : la dame de la Coste intente, au même instant et par pure vengeance, un procès en retrait féodal au tenancier d’un sien jardin, parce qu’il a pris fait et cause contre elle dans le conseil qui a décidé du départ de la maîtresse d’école.

Autre complication ou autre menace : la petite qui était au couvent de Caderousse est partie pour Lyon avec deux jeunes gens dont l’un se dit son parrain.

L’affaire d’Aix se résout en parlottes. L’avocat Siméon trouve que les moyens de cassation sont bien faibles et la présidente convient « qu’on ne peut y trouver que ce qui y est », mais il suffit d’obtenir la faveur de le faire valoir. Gaufridy se rend à Aix pour prendre langue avec l’avocat et un magistrat, qui ne vient pas au rendez-vous. Il expose à la présidente, en termes de pratique et comme on le ferait à un confrère, les diverses procédures qui ont été successivement envisagées : opposition, révision ou cassation. La première serait faite au nom de la famille, mais le ministère public refuse de la suivre dans cette voie ; les deux autres supposent la représentation du contumace, et, par ailleurs, les nullités que madame de Montreuil a relevées dans un mémoire, ne fournissent que de faibles moyens. La présidente est fort indécise.

Cependant le marquis s’ennuie en Italie. Il n’a pu toucher une rescription qui lui est envoyée par sa femme, parce qu’il s’était fait passer pour célibataire. Il veut revenir par Marseille et on lui renvoie la Jeunesse pour l’en détourner. Il fait, semble-t-il, le va-et-vient entre Naples et Rome et expédie une grande caisse pleine de curiosités et d’antiquailles. Selon Rainaud, qui la reçoit, c’est la plus grande folie qu’on puisse commettre : l’avocat aixois ne donnerait pas douze sols du contenu, si l’on en excepte un cahier de dessins qui l’amusent. Il y avait dans cette caisse une écritoire pour Gaufridy, dont la soucoupe est arrivée cassée. Le digne homme est aussi béotien que son confrère. « On voit bien à votre phrase, lui écrit la marquise, que vous n’êtes point antiquaire. Demandez à M. l’abbé de Sade : il vous dira ce que vaut une caisse d’antiquités venant de Rome. »

M. de Sade quitte définitivement Naples le quatre mai après avoir annoncé l’envoi d’une autre caisse, dont il ne donne pas le contenu, mais qui, selon Rainaud, contiendra les trésors de l’empire romain et donnera maille à partir avec le bureau des fermes de Septèmes « qui est