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LA MÈRE DE DIEU.

un tonnelet de bière, Sabadil entra avec Lampad Kenulla.

Nimfodora, qui jusqu’à ce moment s’était tenue adossée à la muraille, dans l’immobilité d’une statue, se jeta aux pieds de Mardona et enlaça ses genoux de ses deux bras comme pour chercher une protection auprès d’elle. La Mère de Dieu embrassa la jeune fille et regarda Sabadil fièrement.

« Silence ! silence ! s’écria Kenulla. Ce n’est pas maintenant le moment de jouer des instruments et de danser. Nous sommes menacés par un jugement terrible du Très-Haut. Sodome et Gomorrhe ont pris naissance au milieu de nous, et l’heure est proche où le feu du ciel viendra exterminer les pécheurs. »

La musique se tut. Tous les assistants acclamèrent Kenulla.

« Quelle nouvelle apportes-tu ? Qu’est-il arrivé ? demanda Mardona.

— De faux prophètes s’élèvent, continua Kenulla ; ils détournent et séduisent ton peuple, reine des anges. Ce coquin de Sukalou et Wewa, cette oie stupide, soulèvent la masse contre toi. Wewa prétend que Dieu l’a élue, et te rejette. Il y en a un grand nombre qui se sont retirés de toi, pour se rattacher à ces faux prophètes. Ce nombre augmente chaque jour ; il s’accroît comme le sable de la mer.

— Qu’y a-t-il à faire ? demanda Nilko Ossipowitch très ému, les cartes de tarok à la main.

— Vous le demandez ? hurla Barabasch exaspéré. Mais… exterminez-les tous sur-le-champ ! transpercez-