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SASCHA ET SASCHKA.

« Votre père s’est battu comme un héros, s’écria Silvaschko ; il a porté deux coups de sabre au baron, l’un à la poitrine et l’autre sur la tête !

— Assez sur ce sujet, dit le curé essuyant ses yeux ; mais ce n’est pas encore là mon plus grand souci : il s’agit maintenant de me justifier devant la loi et devant mon évêque, ce qui me sera très difficile. »

La voiture se remit en marche. Enfin, quand les autres personnes accourues à leur rencontre les rejoignirent haletantes, hors d’haleine, Silvaschko arrêta les chevaux ; le curé sauta de la voiture, et sa femme, ses enfants, riant et pleurant à la fois, se suspendirent à son cou et à ses vêtements, lui baisant les lèvres et les mains ; et le chantre, pleurant aussi à chaudes larmes, se tenait à leur côté, se dédommageait de la prise qu’il avait perdue.

Qui aurait pu alors exprimer par des paroles ce que chacun ressentait si vivement ?

Quand tout le monde eut retrouvé le calme, Spiridia se mit à examiner son mari comme si elle doutait encore qu’il fût sorti sain et sauf de cette affaire ; puis Ogan s’écria :

« C’est tout de même beau, monsieur le curé, que vous ne vous soyez pas laissé écharper ; Dieu vous récompensera de votre générosité. »

Enfin Marga et Karol arrivèrent à leur tour au galop. Ils avaient appris dans le bois de bouleaux l’issue du duel, et ils s’étaient élancés sur les traces de la voiture. Marga descendit de son cheval, entoura le curé dans ses bras, et l’embrassa avec élan.

« Eh bien, n’ai-je pas tenu parole ? dit celui-ci en