Page:Sacher-Masoch - Les Prussiens d’aujourd’hui, 1877.djvu/713

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
303
LA NOUVELLE ANADYOMÈNE

tour accoutumé chez Rondeau. Il s’engagea dans la grande allée où, confondu parmi les piétons, il entendit une conversation très-intéressante entre une modiste et un coiffeur.

— Serait-ce vrai ? disait la modiste, la générale Mardefeld ! Je vais cependant beaucoup à la maison ; ma maîtresse m’y envoie chaque fois qu’il faut porter un chapeau que la générale a choisi ou fait mettre à la mode, et je n’ai jamais rien entendu dire par les domestiques, pas la plus petite chose. Jusqu’ici elle avait été irréprochable, tout à fait irréprochable ; mais, en vérité, qui pourrait résister à une majesté ?

— Je vais vous dire, mademoiselle Lisette, répondit le coiffeur. Je sers la plupart des dames de théâtre, comme vous savez ; j’ai aussi l’honneur de coiffer la Belmont, et cela fait la joie de la populace que le roi courtise la générale, parce qu’il quittera bientôt la Belmont. La Valéria n’en reste pas moins une belle femme, et, en somme, si le roi ne vient plus la voir, elle ne s’en inquiétera pas déjà tant ; elle pourra jouir de la vie, sans se gêner ouvertement, et non en secret comme elle est forcée de le faire maintenant. En voilà une qui a su se faire payer ! Elle a un demi-million à la banque anglaise, et le roi lui a fait cadeau du palais qu’elle habite. La villa là-bas est aussi à elle.