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L’ÉCOLE DE LA VERTU

et en Russie ! Nous sommes aujourd’hui trop civilisés pour être capables de choses aussi hardies et ces Allemands sont trop réfléchis, ont la peau trop dure. Il n’y a d’autre ressource que de prier et de jouer à la mère du pays. Non, je ne supporterai pas plus longtemps ce misérable genre de vie. Arrive que pourra, je suis résolue à en finir. Ah ! si j’avais seulement une amie, sur laquelle je puisse compter, une véritable amie !

La reine cessa de parler, regarda attentivement la générale et baissa les yeux sur le parquet, en se rongeant l’ongle du pouce.

— Votre Majesté peut toujours compter sur une servante dévouée, répondit Hanna après quelques instants.

— Chère Hanna, si je pouvais me fier à vous, murmura la reine, si j’étais sûre que vous aurez le courage… Il me faut une alliée vaillante, résolue.

Hanna se vit arrivée au but tout d’un coup. La confidente de la reine ! C’était là une position, une mission de nature à la charmer, l’occuper, à remplir son existence. Elle serait initiée à toute sorte de secrets ; elle prendrait part à des intrigues, à des entreprises secrètes, peut-être dangereuses. Elle réfléchit quelques secondes, en proie à la joie, à la crainte, puis elle s’agenouilla devant la reine et lui baisa les mains.