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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

exemple, fit Hanna, prompte à la réplique. Et puis, nos classiques sont-ils décents ? Sont-elles décentes, les scènes de Faust, qui peignent la séduction, l’infanticide de la pauvre Gretchen, ou celles de Gœtz de Berlichingen, dans lesquelles Adélaïde se fait aimer du page Frantz et le pousse au crime ? Est-ce que jamais un auteur dramatique français de nos jours a montré plus de hardiesse immorale que Schiller dans Fiesco, avec la fille de Vérina ? Lady Milford n’est aussi qu’une courtisane, et dans le drame de Don Carlos, qu’y a-t-il, sinon de l’infidélité conjugale historique ?

Micheline haussa les épaules, leva les yeux au ciel.

« Elle n’a pas de tact du tout », pensait-elle ; « oui, elle a été mal élevée comme le sont tous les enfants des gens pauvres. »

À la sortie de table, les messieurs passèrent pour fumer dans une salle où il y avait un billard et dont les murs étaient ornés de fresques représentant des chasses, des batailles, selon le détestable goût allemand. Les deux jeunes femmes se rendirent dans le boudoir d’Hanna, et Micheline n’eut garde de ne pas glisser tendrement son bras autour de la taille de son amie.

Les messieurs se mirent à raconter de leur mieux leurs histoires fortement épicées.