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UN HOMME LOYAL, ETC.

Les fenêtres de la somptueuse chambre à coucher de la générale ne donnaient pas sur la bruyante place du château ; elles s’ouvraient sur la rue des Turcs qui aboutit à cette place. Un matin, il y eut de la paille étendue pour amortir le bruit des voitures, et dans la maison une jeune mère tint son premier enfant dans ses bras.

Ce jour-là Hanna fut heureuse comme jamais elle n’aurait cru l’être. En entendant le premier cri de son enfant, un sourire indescriptible illumina sa belle figure naguère assombrie par la douleur. Le général pleurait de contentement ; toute la maison était en joyeux émoi. Dans tout ce qui s’y passait, s’y disait, il y avait une certaine angoisse, une certaine gravité.

On aurait cru qu’un grand événement venait de se produire. Les rideaux des fenêtres étaient si soigneusement tirés qu’il faisait presque noir dans la chambre de la jeune mère et chacun marchait sur la pointe des pieds, quoique les tapis épais fussent là pour adoucir le bruit des pas. Personne n’osait parler haut.

Et tout cela pour qui ?

Pour un enfant venu au monde très-faible, pour un enfant qui sera sottement élevé, instruit, et qui fera un jour un homme maladif, malheureux.