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LES PETITS SECRETS D’UNE ACTRICE

plus grande indifférence, en constatant que Rosenzweig lui-même, Rosenzweig qui l’avait tant apprécié, s’était contenté de relever une seule fois les sourcils et de dire à Valéria de sa façon spirituelle : « Vous avez là un domestique qui ressemble beaucoup à quelqu’un, mais je ne sais pas à qui », il se sentit tout à fait rassuré et devint de jour en jour plus entreprenant.

Valéria s’inquiétait de lui ni plus ni moins qu’on ne s’inquiète d’un domestique. Pourvu qu’il nettoyât bien la chaussure, servît convenablement, fît promptement et bien ses commissions, elle était contente. Les missives parfumées qu’elle envoyait journellement au roi et dont elle honorait aussi quelques autres adorateurs exigeant une certaine adresse, une certaine discrétion, elle oublia très-vite la pensée haineuse qu’elle avait eue de faire de son amant son esclave en livrée, et ne vit dans Plant qu’un serviteur précieux en son genre. Elle ne lui demandait donc jamais ce qu’il dépensait pour elle, à condition que chacun de ses désirs fût accompli avec la rapidité des contes orientaux, que chacun de ses ordres fût exactement exécuté.

Plant avait ce trait particulier de l’homme sage de chercher le grand dans le petit. Tout en gagnant dix florins sur un vase d’albâtre, il ne dédaignait pas les kreutzers qu’il pouvait compter en trop