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SOUS PRÉTEXTE D’IDÉALISME

n’était pas nouveau, que par sa manière d’être proprement dite. Elle attachait une certaine importance à la sincérité. Elle était trop fière, trop facile à vivre pour être hypocrite, pour mentir, cacher ce qu’elle pensait. Toute remarque qui la frappait passait rapidement de son œil perçant, scrutateur, à sa langue affilée. Elle disait aux hommes les choses les plus hardies avec une bonhomie qui les désarmait tous. Cette franchise sans art avait comme une agréable verdeur dans un monde d’hypocrites, de menteurs, de flatteurs. L’actrice était impitoyable dans son amour de la vérité ; elle prenait un plaisir cruel non-seulement à blesser, mais à retourner le poignard dans la blessure et à rire en outre des grimaces douloureuses de sa victime.

Plant lui présenta un jour un jeune cavalier, dont l’abondante chevelure frisée retombait sur le front en petites boucles.

— Comment donc êtes-vous frisé ? s’écria Valéria. Cette coiffure serait tout au plus bonne pour une fillette sortant du pensionnat.

Et elle se leva pour passer ses mains dans les boucles du malheureux jeune homme, qui reculait d’un air de vive contrariété.

— Laissez-vous faire, ajouta-t-elle alors. Je veux vous arranger comme il faut.