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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

cher une admirable créature du genre de cette princesse Paula.

— Les femmes comme elle qui vous font l’effet d’un éclair, dit le sculpteur, on ne les trouve que dans les hauts rangs, les rangs princiers.

— Pardon, riposta le clerc, qui n’aimait pas les phrases incomplètes ; on les trouve dans le monde et le… demi-monde. Entre ces deux mondes, il y a le désert de la bourgeoisie, et c’est là que nous cherchons vainement le plaisir, la surexcitation. Nous, plébéiens, nous devons nous contenter des tabliers de cuisine ou parfois de quelques boucles plus poétiques, mais d’un joli modeste, d’un joli sage, d’un joli ennuyeux. Savoir se faire une belle existence est aussi un art. Les femmes, comme la princesse, sont initiées à cet art, et c’est pour cela que tout le monde les admire, désire les approcher.

Un rire bruyant coupa court à l’enthousiasme de Plant. Tout désagréable qu’il était, ce rire n’avait rien de faux, de diabolique ; c’était le franc rire d’un enfant à qui quelque chose fait grand plaisir. Il ne résonnait même désagréablement que parce qu’il provenait du solitaire joueur d’échecs, car c’était bien le comte Riva qui avait ri ainsi de tout cœur.

Ses voisins le regardèrent avec étonnement. Il