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UN VÉRITABLE ALLEMAND NE PEUT, ETC.

était aussi le nôtre. Nous, nous n’avons pas même tenté l’épreuve. Ne venez pas me dire que jamais, en Allemagne, la situation n’a été aussi mauvaise qu’en France avant la grande Révolution.

Nous n’avions pas de Bastille, c’est vrai ; mais, en revanche, que de forteresses et de prisons ! Nous n’avions pas non plus de grande Pompadour à l’époque ; mais nous comptions cinquante petites Pompadours, coûtant pour le moins cinquante fois autant que celle de France. Jamais un roi de France n’a bâtonné ses sujets en pleine rue ni vendu les enfants de son royaume à des potentats étrangers ; tout au contraire, Louis XVI, le guillotiné, envoyait ses soldats par delà l’Océan au secours de la liberté. Pourtant les Français ont fait une révolution et, nous, nous ne l’avons pas faite ; nous, nous avons marché contre la liberté sous la conduite de nos princes. Ne sommes-nous pas, au fond, un peuple très-original ?

La force et la gloire nationale, tel est l’idéal politique de notre temps. Alors que les Français, les Anglais et les Russes poursuivaient ce même idéal, c’était révoltant à nos yeux ; aujourd’hui, nous pensons différemment à cet égard. Nous trouvions même ridicule que les Tchèques, les Croates, les Serbes et tant d’autres pussent s’at-