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TROIS JEUNES SAGES ET UN VIEUX FOU

et de fouet claquant fortement. Aussitôt, Plant frôla la vitre de sa manche, et ses compagnons vinrent, comme lui, y coller leur visage.

Dans un traîneau attelé de quatre chevaux blancs, à tête empanachée de plumes flottantes, et ayant sur le siége de derrière un petit groom rouge qui grelottait de froid, apparut une jeune et jolie dame, en toilette d’hiver princière, guidant elle-même d’une main vigoureuse les coursiers fougueux.

En un clin d’œil, de même qu’une vision fantastique, elle s’était montrée et avait disparu, laissant derrière elle les trois jeunes gens plongés dans une extase muette.

Le premier à retrouver la voix fut le clerc de notaire.

— Quelle femme ! fit-il. Dans son regard et jusque dans son moindre mouvement, le despotisme de la beauté, l’énergie de la volonté, parlent en elle. Partout où elle se montre elle règne, elle commande en souveraine, et sans lutte, sans violence, on se soumet à son joug volontairement.

— Tu t’animes, Plant ! dit Andor en riant.

— Tu crois ? Je ne dis pas non ; mais, dans mon animation, il y a surtout de l’envie et de la rage de ce que des gens comme nous ne puissent appro-