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UN VÉRITABLE ALLEMAND NE PEUT, ETC.

mer n’est plus aussi philosophique, aussi nébuleuse qu’autrefois. Le canon parle une langue qui a du moins cet avantage de ne rien laisser à désirer sous le rapport de la clarté. Nous sommes un peuple très-original ; vous en avez certainement déjà fait la remarque, mes jeunes amis. Nous n’imitons les Français en rien ; en rien, c’est peut-être beaucoup dire ; mais, pour les choses principales, nous ne les imitons pas ; c’est positif.

» Du temps de la grande Révolution française, nous nous étions pris d’un bel enthousiasme pour la République, les droits de l’homme ; nous nous sommes détournés ensuite avec horreur des scènes finales de cette terrible tragédie, pour fonder la Tugendbund[1] et la Sainte-Alliance. La guillotine que le peuple laissait fonctionner nous épouvanta ; mais la schlague, les casemates des forteresses, la Sibérie et la potence, ces jolis moyens pratiques des gouvernements, ne nous causaient aucune épouvante. Nous restâmes ensuite, un certain temps, de bons citoyens, de bons sujets, jusqu’à ce qu’en 1830 la fantaisie fût venue à nos voisins d’outre-Rhin de chasser leur roi.

» Aussitôt nous redevînmes des hommes altérés de liberté, et notre soif dura jusqu’à la merveil-

  1. Alliance de la vertu