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LE PENSUM DANGEREUX

se détacher du papier qu’ils regardaient obstinément.

— Hanna ! chère Hanna ! murmura Andor, ne pensant plus qu’il était dans l’austère maison des Teschenberg, oubliant le monde entier, s’oubliant lui-même, ne pleurez pas ; je ne saurais vous voir pleurer. Si cela pouvait vous servir à quelque chose, je donnerais ma vie pour que vous soyez heureuse.

— Vrai ! répondit la jeune fille à voix basse, très-basse, en levant vers lui ses yeux encore tout humides de larmes, dans lesquels brillait la joie. Ah ! Andor, que de soucis vous m’avez donnés hier et aujourd’hui. J’étais entièrement avec vous par la pensée ; je sentais mon cœur à la veille de se briser, tant j’avais peur pour vous.

— Pour moi, chère Hanna, murmura le jeune homme devenant tout à coup aussi hardi qu’il l’avait été en face du baron. Vous me voulez donc du bien ? Moi… Hanna… je ne pense plus qu’à vous. Je ne saurais vous dire ce que j’ai dans le cœur ; c’est comme une douleur profonde et une joie infinie. Je vous aime tant, tant, Hanna.

Elle s’empara brusquement de ses mains, les serra contre son sein, qui se soulevait, et son regard chercha celui d’Andor avec tant d’abandon qu’il perdit tout à fait la tête.