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LE PENSUM DANGEREUX

— Ne soyez pas méchant envers moi, docteur, balbutia Hanna. Je… je n’ai pas pu le faire. Vous m’aviez infligé la description du printemps, que sais-je du printemps, grand Dieu, si ce n’est qu’à cette saison on envoie les fourrures chez Kürschner, le fourreur, qu’on se prépare des toilettes légères, et qu’on commence à manger des épinards et des écrevisses ?

— Vous ne sortez donc jamais de la ville, mademoiselle ?

— Mais si ; je vais au parc, répondit Hanna avec vivacité, pendant que ses grands yeux clairs erraient de tout côté, ainsi que des fleurs doucement agitées par le vent ; et lorsque l’été arrive, nous faisons çà et là une petite partie de campagne, avec du café froid que l’on réchauffe. Dans ces excursions, on voit tout juste que la forêt est verte, le ciel bleu, et quand nos compagnes ne bavardent ou ne rient pas trop, on entend dans la profondeur du bois des voix étranges d’oiseaux. Mais c’est tout ce qu’on voit, tout ce qu’on entend ; et, de même qu’en ville, on ne parle guère que des toilettes des actrices, des histoires galantes des grandes dames. Ce qu’il y a de mieux encore, c’est quand on joue aux jeux innocents. Je sais bien que ce n’est plus de bon ton, mais on a du moins occasion de se remuer.