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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

le mort, soupirer, exhaler des regrets, jeter la pierre à la malheureuse jeune fille, avec leurs insinuations, leurs demi-mots, leurs regards vers le ciel. Plant seul ne se montrait pas.

Les chants funèbres retentirent devant la petite maison de la rue des Lys ; les porteurs à nez rouge, comme un nez de masque, et ayant trop bu, chargèrent le vieux brave sur leurs épaules ; derrière le convoi cheminèrent en chancelant deux femmes vêtues de noir, la figure cachée dans leur mouchoir. Plant ne se montrait toujours pas.

Les pelletées de terre tombèrent dans la fosse ouverte ; l’église se vida ; sur un tertre s’évanouit une jolie jeune fille pâle ; une vieille femme tremblante lui prêta secours, et, ne pouvant la ranimer, jugea à propos, dans le trouble de son cœur, de s’accorder une prise de tabac. Même en ce moment, Plant fut invisible.

Il vint pourtant, après quelques jours, mais il vint la nuit, la figure bien enfoncée dans un cache-nez et pas pour consoler.

— C’est un scandale, dit-il ; toute la ville parle de Marie, et lui jette la pierre.

En parlant ainsi, il faisait le moraliste comme tout Allemand de nos jours.

— Je veux bien croire, ajouta-t-il, qu’en tout ceci elle est innocente ; mais dans toute sa conduite