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POINT D’HONNEUR

qu’ils fuient les larmes de leur jolie petite femme pour courir vers les soi-disant dames à cœur de marbre.

Ce fut par une sombre soirée d’hiver que Wolfgang, enveloppé dans un manteau, gagna le coin de la rue des Lys. Il tremblait d’émotion, de doux espoir.

À huit heures sonnantes, Marie, enroulée dans un grand châle, vint le chercher. Dans l’obscurité, elle le guida jusqu’à la porte de Keith qu’elle ouvrit, le fit entrer et referma la porte derrière lui.

Le sculpteur fut ébloui. Marie avait tout arrangé gentiment, de manière à satisfaire même le goût d’un artiste.

Des rideaux rouges cachaient les fenêtres et un ciel de lit rouge surplombait le lit à oreillers de dentelle. Le parquet était recouvert d’un grand tapis. Une petite lampe, suspendue au plafond, répandait une faible clarté dans la chambre. Près de la cloison était un divan turc très-bas, entouré d’orangers, de citronniers et de lierre espalier. Une peau de tigre cachait le meuble, et sur cette peau de tigre était couché le jeune dieu, revêtu d’une robe de satin blanc, d’un pardessus en soie garni de dentelles noires. Un voile noir enroulé autour de sa belle tête de Bacchus, il se tenait accoudé sur un bras et souriait à Wolfgang.