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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

veux étaient absents. Il traversa les quatre salles, saluant à droite et à gauche. Dans la salle de danse, il se vit aussitôt rejeté contre le mur, où les hanches arrondies d’une jolie petite femme potelée, ayant bien devant elle un tout jeune homme, le retinrent impitoyablement cloué.

« Cela commence bien », se dit Andor.

Il avait beau être un philosophe pessimiste et un idéaliste descendu en droite ligne de Bouddha, il n’était qu’un homme, après tout. Aussi se trouvait-il comme « le jeune homme dans le poêle rougi ». Il essaya lentement de se dégager à gauche, mais la belle, devant lui, fit un mouvement qui le retint prisonnier à nouveau. Il voulut s’échapper à droite ; trop tard d’une longueur de nez ; une seconde jeune dame, très-maigre celle-ci, vint se poster en avant de lui et darda ses coudes en arrière comme deux lances.

Il fallait se résigner. Le docteur tenta alors de se distraire de son mieux. Tantôt il laissait errer ses yeux sur la foule des habits noirs, des uniformes blancs, bleus, verts, sur les jupes de soie chatoyantes, les dentelles flottant çà et là, ou bien il les fermait complétement pour écouter la musique, pour écouter toute cette variété de sons remplissant l’intervalle entre deux danses et faite de paroles, de rires, de bruissements, de claquements,