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gentilhomme, je ne vous dédaigne pas mais ne puis vous aimer.

— Vous refusez ma main ? s’écria Sarolta.

Bethlémy s’inclina très bas, puis se retira.

La forte et jadis si cruelle femme tomba à terre et se mit à sangloter. Plus d’une heure durant, un combat violent se livra dans son âme. Elle se leva enfin résignée ; froide comme le marbre. Désormais, elle était résolue à toutes les extrémités, tout ce qui s’appelle amour, pitié, ménagement était désormais arraché de son cœur. Dès maintenant, son seul mot d’ordre serait l’exercice de sa vengeance sur le genre humain, la pratique de la jouissance et de la cruauté.

Elle arrêta l’entreprise d’un plan aussi aventureux que téméraire qu’elle nourrissait secrètement depuis la mort de son mari et qu’elle se promettait de mener à bonne fin dans toute la mesure de son infernale lubricité, de sa cruauté bestiale et de ses instincts sanguinaires.

À la nuit tombante, la vieille sorcière de Parkany introduisit chez la princesse un homme natif de la Poussta qui ne connaît pas de seigneurs, c’était un betyar, un voleur. Il se nommait Eyula Bartany. Il était de petite taille, mais bâti en hercule et âgé d’une quarantaine d’années. Sarolta le reçut avec une curiosité non déguisée et le laissa lui faire le récit des épisodes de sa vie