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CHAPITRE VIII

La Hyène de la Poussta

L’empoisonneuse avait été assez prudente, après la mort du prince, pour prendre le deuil le plus strict et pour feindre une douleur confinant à la folie. Il ne lui sembla pas suffisant de s’abstenir de tout ce qui pouvait être considéré comme un plaisir quelconque, elle les bannit de sa demeure et ne laissa aucun visiteur pénétrer dans sa chambre, voire même au château. Elle laissa même s’accréditer le bruit qu’elle couchait dans un cercueil, sa chambre tendue de drap noir, et passait le jour en prières et en pieuses pratiques. Le fait est que la vieille sorcière, les deux femmes de confiance, Ersabeth et Iéla et le Père Pistian étaient les seuls visiteurs admis dans ses appartements. Le curé venait sous le prétexte d’apporter à la veuve les consolations de la religion, mais en réalité pour assouvir sa sensualité.

Un certain jour, Bethlémy vint aussi pour présenter ses condoléances à la princesse. Il savait par expérience qu’une carte de visite ne forçait pas sa porte et qu’elle évitait fort adroitement qui l’importunait. Or, il en advint tout différemment. Il fut admis et trouva Sarolta vêtue d’une robe noire toute simple, la tête couverte d’un