Page:Sacher-Masoch - Le legs de Caïn, 1874.djvu/154

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

miné mon fusil, que je déposai ensuite dans le coin du mur à portée de ma main, je m’étendis sur la couchette d’une simplicité claustrale. Mon chien se coucha comme d’habitude à mes pieds, puis, m’ayant lancé un dernier regard de ses yeux doux et intelligents et battu le plancher de sa queue, il appuya sa tête sur ses pattes de devant et finit par s’endormir. La fenêtre resta ouverte.

II

Je rêvassai pendant quelques minutes les yeux ouverts, puis le sommeil me gagna aussi. Je ne sais combien de temps j’étais resté ainsi quand mon oreille fut frappée par un bruit assez étrange. Le chien remua, leva sa belle tête aux yeux vigilants, renifla et fit un appel sec et rauque comme devant un fauve. J’étais complétement réveillé, et ma main avait instinctivement saisi le canon de mon fusil. Un silence profond régnait au dehors, la nature semblait respirer lourdement ; puis de nouveau ce bruit mystérieux, un bruit comme d’un long vêtement qui traîne sur le sol. Puis soudain apparut dans la croisée une silhouette blanche ; c’était une femme de taille royale, légèrement drapée dans une étoffe ondoyante.

Je ne pus voir sa figure : baignée par la clarté de la pleine lune, elle semblait transparente ; de sa

    seignée sa mère. Alors le diable le lâcha, et il resta suspendu entre le ciel et la terre ; il y est encore. De temps en temps, une araignée monte jusqu’à lui, et lui apporte des nouvelles de la terre.