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LE PALAIS ROUGE

ridicule comédie qu’il organisa pour le transfert des restes de Pierre III à la citadelle, ne les a-t-il point forcés de suivre le cercueil ?

— Forcer des meurtriers à suivre le cercueil de leur victime, s’écria étourdiment Argamakoff, c’est une étrange manière d’exercer la justice.

— La manière d’un fou, confirma le colonel en élevant également la voix. Et cette idée de faire badigeonner les ponts, les guérites et les portes de la ville couleur d’Arlequin ? Et ce nouveau palais qu’il fait construire, où il n’y a pas une frise, pas un ornement, pas une porte, pas une fenêtre, qui ne soient décorés de son monogramme P. J. surmonté de la couronne impériale ? Un original Anglais s’est donné la peine de compter le nombre de fois que le motif se répétait. Il est allé jusqu’à 8.000, puis y a renoncé.

» À côté de ces caprices bizarres, il a des passages subits de la magnanimité à la tyrannie, de la bonté à la cruauté. Cela me semble de la folie et je voudrais que tout le monde pensât de même.

— Et quand cela serait ? questionna Argamakoff.

— On se souviendrait à temps qu’on ne peut