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LA FONTAINE AUX LARMES

laient leurs voluptueuses senteurs, les jets d’eau bruissaient et les rossignols chantaient dans tous les buissons.

Enfin, elle parut. Il l’entendit, au bas des terrasses, parler à son esclave, qui s’accroupit au bord du bassin, tandis que sa maîtresse gravit seule les degrés. Elle avait, sur ses épaules, la précieuse pelisse, et, plus comme parure que pour se voiler, une petite écharpe de gaze brodée d’argent enroulée comme un turban autour de ses cheveux.

Le jeune homme s’étant prosterné pour lui rendre l’hommage d’un esclave à sa maîtresse, elle sourit et, le relevant de sa froide et blanche main,

— Viens, ami, dit-elle, nous allons nous asseoir sous les arbres, nous raconter notre vie et parler de notre patrie.

Elle fit quelques pas dans l’ombre où une source fraîche s’échappait de la pierre blanche, et prit place sur le rebord du marbre, tandis que l’esclave s’étendait à ses pieds.

— Tu as été malade, maîtresse ? commença-t-il. Ils disent que tu as attrapé les fièvres dans les jardins, la nuit.