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LA PÊCHEUSE D’AMES.

« Dieu a jugé, dit-il ; son âme est devant lui. »

Anitta se mit à genoux et éleva en pleurant ses bras vers le ciel. Puis elle se releva, tira le poignard qu’elle portait à sa ceinture, coupa rapidement les cordes qui liaient son bien-aimé, et, sanglotant de joie, le serra contre sa poitrine.

« Sauvé ! murmura Zésim, sauvé par toi ! »

La nourrice se précipita alors dans la salle, et se suspendit en pleurant au cou de Zésim.

« Mon enfant ! s’écria-t-elle, mon cher enfant ! Le ciel t’a protégé et cet ange t’a sauvé ! »

Le traîneau de Kachna fut bientôt attelé. Zésim aida Anitta à y monter, et Tarass sauta sur le siège du cocher. On partit au galop pour Kiew et l’on alla droit au palais Oginski.

Zésim, tout triomphant, rendit la bien-aimée à son père et à sa mère, qui bénirent le jeune couple en versant des larmes de joie et rendirent grâces à Dieu par un vœu solennel.

Aujourd’hui, à Kasinka Mala, à la place où était jadis le cabaret et où Dragomira mourut, s’élève une chapelle dédiée à la Vierge. Tous les ans, au jour anniversaire de celui où Zésim fut sauvé par Anitta d’une façon si merveilleuse, un prêtre y dit une messe basse pour l’âme de la malheureuse, victime d’une épouvantable superstition.


FIN