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LA FEMME SÉPARÉE

un Napolitain. Une araignée a tissé sa toile entre ses doigts, d’un de ses bras à l’autre ; comme cela il a l’air de lui tenir le tissu auquel elle travaille assidûment.

La poussière a revêtu une autre statuette d’une couche floconneuse qui forme comme une tunique jetée sur son corps nu, et qui lui donne l’air d’un saint Jean-Baptiste. Un arbre fruitier tend son rameau brun dans la chambre par le carreau cassé d’une fenêtre, et y fait pleuvoir des feuilles rouges et jaunes. Au plafond, entre le mur et le fil de la sonnette, est collé un nid d’hirondelles abandonné.

Je traverse le long du corridor pavé de mosaïque, et redescends dans le jardin, de l’autre côté de la maison. Partout les mêmes traces de vétusté : les plates-bandes envahies de mauvaises herbes, la pelouse zébrée d’amas de hauts foins et de places nues, foulées, sans végétation.

Les haies et les arbres, taillés dans le style de Versailles, ont jadis bordé les allées sablées comme de véritables murs, coupés par place de niches qu’occupent des statues. Elles sont toutes mutilées aujourd’hui. Un Neptune a perdu son trident, une Minerve repose dans l’herbe, une Vénus se dresse, les bras brisés, une corde au cou, à laquelle est attaché un rosier desséché. Des pièces de linge sont étendues à sécher. Dans l’énorme bassin du jet d’eau