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LA FEMME SÉPARÉE

égard. Un jour, je lui dis, avec un regard méprisant et une moue significative :

— Je te réponds que cela ne m’arrivera plus, d’être abandonnée par un homme.

Une autre fois, je tombai à genoux devant lui en pleurant, et je le conjurai de ne pas me quitter.

— C’est pour toi que je me suis séparée de mon mari, de mes enfants, du luxe auquel j’ai été habituée ! m’écriai-je. C’est ton devoir de m’aimer toujours.

— Tu te trompes, répondit Julian d’un ton glacial. Tu as quitté le domicile conjugal parce que ton mari t’a pris tes enfants et que sa maîtresse te gênait. Tu as refusé de te séparer de ton mari, alors que je t’en ai priée longtemps auparavant.

Je ne savais que répliquer. Je fondis en larmes. Il prit son chapeau et sortit. Je l’appelai de la fenêtre ; j’envoyai ma femme de chambre le supplier de revenir. Elle le ramena.

La prochaine fois qu’il m’arriva de m’évanouir pour une bagatelle, Julian me versa sur la tête une cruche d’eau froide. Et dès ce jour, il lui suffisait de jeter un coup d’œil du côté du lavabo, lorsque mes crises me reprenaient, pour me rendre à la raison complètement. Je l’ai tourmenté de toutes les manières imaginables. Je l’accusais de rudesse à mon égard, de cruauté, de lâcheté.

Quand j’y songe, je vous assure que je me de-