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LA FEMME SÉPARÉE

rant contre moi, est trop tendre, trop faible, trop sentimentale pour toi. Ton idéal, c’est la grande Catherine. Tu as besoin d’une femme comme moi, d’une femme noble, riche, qui ne vive que pour ses caprices, que pour ses fantaisies, qui s’intéresse à toi, mais qui ne t’aime pas, qui se joue de toi et qui dévore ta vie comme un vampire.

» Je suis belle. Plus d’un homme a sacrifié son existence pour mon amour. Je serai à toi, mais il faut que tu te livres entièrement à moi. Suis-moi où je t’ordonnerai de me suivre ; ma puissance sans borne t’instituera dieu ou esclave ; là, je puis, selon ma volonté, te faire lier à un poteau, te faire fouetter, te faire écarteler. Hein ! tu n’en as pas le courage ?

» — Et si je l’ai, ce courage ?

» — Alors, je t’enlèverai cette nuit.

» — Comment donc ?

» — D’une façon très simple. Tu me suis dans ma voiture, je te bande les yeux, je te mets des menottes et te bâillonne. Le reste me regarde. Es-tu décidé ?

» Je me tus.

» — Tu as peur, dis ?

» — Non.

» — Alors, viens.

» Elle se leva.