Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/228

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
212
LA FEMME SÉPARÉE

souveraine, avec un diadème étincelant sur la tête et des dentelles impossibles.

Je n’aurais jamais consenti à m’asseoir aux fauteuils d’orchestre ; non certes. Lorsque notre loge était comble, lorsque tous les amis de Julian m’y rendaient visite et se montraient ravis de mon esprit et de ma grâce, j’étais satisfaite. Par malheur, Julian, comme mon mari, comme mon père, avait la manie de me produire. Et, ainsi, il m’exposait sans scrupule à toutes les tentations. Lui-même amenait mes adorateurs dans notre maison. Le moins dangereux d’entre eux a été notre ami, je crois… le comte Henryk.

— Ah ! notre Platon, m’écriai-je.

— Il hait les femmes et il les adore tout à la fois, reprit Mme de Kossow. Vous connaissez son histoire, je suppose, sa piquante aventure avec la princesse ?

— Il ne m’en a jamais parlé.

— Confessez-le un jour sans miséricorde, ses aveux vous feront mourir de rire. Il m’a beaucoup aimée — d’amitié, s’entend — il voyait en moi la seule femme avec laquelle la camaraderie était possible, comme avec un homme.

Mes enfants venaient me rendre visite tous les quinze jours. Elles se rendaient aussi chez leur père.