Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/174

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
158
LA FEMME SÉPARÉE

Il est impossible que ce soit votre dessein. Je vous connais pour un honnête cœur, pour un homme loyal. Et vraiment, je vous admire dans ce moment, j’admire votre franchise. Ma femme vous aime. Vous avez de l’ascendant sur elle. J’attends tout de vous, mon ami. Je ne nie pas mes torts. Cela est vrai, j’ai manqué à mes devoirs, j’ai vécu comme un Turc. Mais tout changera, je ne veux plus exister que pour elle. Vous seul pouvez nous réconcilier, la décider à me revenir, à me pardonner.

— Qu’exigez-vous de moi ? dit Julian, mon sang, ma vie ! Je vois que vous êtes incapable de comprendre un amour comme le mien. Mais encore, ce sacrifice, je l’aurais accompli il y a un an, il y a quelques mois, alors que votre femme pouvait être heureuse avec vous. Maintenant, je vous l’assure, elle n’aime que moi, elle ne peut vivre sans moi. Elle n’éprouve pour vous que de la haine, bien plus…

— Que faire alors ? demanda mon mari.

— Séparez-vous, repartit Julian. Vous ne pouvez vivre ensemble, aux yeux du monde, si vous voulez éviter le scandale.

— Cela m’est impossible, soupira Kossow ; je n’ai pas la force de renoncer à elle.

— Et moi, s’écria Julian brusquement, j’ai la force de la retenir malgré vous ! Je ne vous la ren-