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LA FEMME SÉPARÉE

» — Tu vois enfin, insensé, s’écria-t-elle avec mépris, que la femme est faite pour dominer l’homme ! Sais-tu maintenant ce qui te rend son esclave ? Je pourrais à cette heure te couper la tête, et tu ne résisterais pas. »

Mme de Kossow, qui était allée vers la fenêtre et me tournait le dos, s’écria soudain :

— N’allez pas, je vous prie, croire un mot de ce que vous lisez là. Je ne récitais qu’un rôle savamment étudié. J’en rougis aujourd’hui quand j’y pense.

— Mais où pouviez-vous donc puiser ce sang-froid inaltérable ?

— Sa faiblesse me rendit forte, repartit-elle, et lorsque je le vis à mes pieds, le visage par terre, que je posai victorieusement mon pied sur sa nuque, j’éprouvai une sensation immense de volupté et de joie. Mais ne vous interrompez pas.

Je lus plus loin :

« Puis, quel moment que celui où elle se pencha vers moi, effarée, avec un rayon dans les yeux, et qu’elle attira mes mains sur ses épaules molles et douces !… Nous ne vîmes plus rien, ni l’un ni l’autre ; nous n’entendîmes rien ; il me sembla que je m’étais endormi et que je nageais dans le plus beau, le plus suave des rêves.

» Lorsqu’elle m’eut quitté, des clameurs rail-