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LA FEMME SÉPARÉE

taient des turquoises, c’est-à-dire… non, non, des saphirs.

— Pitié ! m’écriai-je, ayez donc pitié !

Bien que je n’eusse jamais aimé mon mari et que je l’eusse trahi et trompé de mille manières, je me sentis envahie par la plus dévorante jalousie dès que je sus qu’il m’était infidèle ; j’oubliai mes propres fautes, et je l’accusai avec véhémence en pleurant et en me tordant les mains.

— Et vous ignorez, continua Julian avec calme, que vous n’êtes que sa sultane favorite. Il en a une foule d’autres, — tout un harem…

— Oh ! vous êtes un démon ! criai-je affolée.

— Mais peut-être m’accuserez-vous de calomnier votre mari par égoïsme, continua Julian en s’apprêtant à sortir. Demandez à qui vous voudrez, toute la ville peut vous renseigner.

Il quitta la chambre, me laissant en larmes, étendue sur le canapé.

J’attendis Julian quelques jours de suite, en proie à la fièvre. Puis je lui écrivis de venir me voir s’il éprouvait pour moi un peu de pitié. C’est à ce point que l’amour vrai, que la passion m’avaient anéantie.

Il vint.

Je n’osai le regarder en face.

— Je vous remercie, dis-je. Je suis heureuse de ce que vous êtes venu, mais, je vous en prie, ména-