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LE MYRTHE DES AMANTS

— Que je vous inspire confiance, et quelque chose de plus.

— Mon père va rentrer, fit la Juive en baissant la voix. Mais, s’il est vrai que vous ne me méprisiez point, venez demain au bord de l’Arno, où je passerai avec les femmes de ma tribu, et faites-moi un signe. Pour aujourd’hui, adieu !

Elle lui tendit la main à travers les barreaux. Avant qu’elle n’eût pu l’en empêcher, il la porta à ses lèvres.

Le jour suivant, les femmes et filles des Hébreux, vêtues d’étoffes précieuses, se promenaient, selon leur coutume, sur la rive droite de l’Arno, entre le pont-vieux et celui de la Trinité. Les patriciennes évitaient alors ces parages ; mais la jeunesse masculine accourait en nombre pour admirer les beautés de l’Orient et, si possible, nouer quelque intrigue amoureuse. La présence du jeune Altoviti parmi les curieux, ne pouvait donc surprendre.

Il eut de la peine à reconnaître la donatrice de la rose, entourée de tout le luxe de l’Asie. Ce n’était plus le doux et ingénu visage de vierge, qui lui souriait, modeste, derrière la grille de la fenêtre. Une superbe femme, aux formes opulentes, s’avançait avec la démarche d’une souveraine, sous ses