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L’AMOUR CRUEL.

— Tu l’as dit, et c’est aussi pour plaire à Dieu que je renonce aujourd’hui à toucher à ce qui est mille fois plus tentant et plus merveilleux encore. Tu es la plus belle entre toutes les femmes, c’est pourquoi je t’ai choisie afin que tu m’induises en tentation par ta beauté, ô fiancée du cantique ! et pour que j’apprenne à dompter mes passions ; car le Seigneur m’a élu et destiné à de grandes choses sur terre.

Sarah tremblait et ne trouvait pas de paroles.

Elle eût voulu crier :

— Fou, insensé, je t’aime, veux-tu me tuer ?

Car Sabbathai était l’homme le plus beau que l’imagination pût rêver. Ses contemporains nous le dépeignent comme un ange dont le visage répandait un éclat éblouissant, et le corps, les plus enivrants parfums. De longues boucles noires coulaient le long de son ovale délicat, qui se terminait par une barbe soyeuse ; ses lèvres, pareilles à des lèvres de vierge, semblaient une rose entr’ouverte ; ses yeux brillaient comme de sombres étoiles où rayonnait une lumière céleste.

— Dévoile-toi, commanda-t-il.

Et, comme elle ne bougeait point, il saisit le bout du voile de sa main diaphane dont l’in-