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L’AMOUR CRUEL

duit se précipita sur son rival, l’entortilla dans son manteau pour l’empêcher de se servir de ses mains, et se mit à le frapper à tour de bras, du plat de son épée, jusqu’à ce qu’un attroupement se formât et que Mlle de Marneville parût à sa fenêtre. Reconnaissant son fiancé qu’on maltraitait, loin de prendre le parti du vaillant agresseur, comme cela eût semblé naturel, elle appela au secours et jura de se venger.

Desforges finit par se lasser du jeu inoffensif avec le plat de l’épée, et s’esquiva, laissant son heureux rival rentrer dans l’hôtel de sa bien-aimée, pour refaire sa toilette. Le malheur voulut que, pendant que le Marquis cherchait dans le sourire de la jeune fille une consolation à sa défaite, Mme de Marneville parlât d’obtenir de la favorite une lettre de cachet contre Desforges.

— Cela ne serait pas si mal, remarqua le Marquis. La Pompadour est justement montée au plus haut point contre les poètes, à cause d’une satire qui lui fait jouer un assez vilain rôle.

— Comment cela ? s’écrièrent les deux dames.

— Oui, confirma le Marquis, des vers circulent depuis deux jours, qui livrent la Marquise à la risée du public.