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LA VÉNUS DE MURANY

ter serment au drapeau de Racoczy. En cas de refus, la mort par la hache du bourreau sera votre partage et votre armée, privée de chef, vouée à une perte certaine. On vous accorde une heure de réflexion.

Wesseleny écouta le tentateur, sans faire un mouvement. Quand la voix se fut tue et que la fenêtre eut été refermée, il se releva et se mit à réfléchir. Lui, le héros que chantait le peuple, le capitaine à qui son empereur et son général avaient confié une mission importante, s’était fourvoyé, comme un étudiant amoureux, dans une aventure galante, et il se trouvait là, prisonnier d’une femme ! Sa gloire était évanouie, ses lauriers, effeuillés, sous la main capricieuse de la cruelle Vénus de Murany.

Des larmes de douleur et de rage jaillirent de ses yeux ; mais son cœur n’hésita pas un instant. L’image de la séductrice se présentait en vain à ses regards, il ne songeait qu’à son devoir, à son serment.

L’heure s’écoula.

Des pas lourds se firent entendre, descendant les marches. La porte s’ouvrit. Des hommes armés remplirent le cachot. Une heure sonnait au beffroi.