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L’AMOUR CRUEL

qu’à vous. Malheur à tout autre qui poserait le pied sur le premier échelon.

« Marie Scetzi. »

Wesseleny eut à soutenir un long et pénible combat. Son âme audacieuse, son cœur passionné, le poussaient à tenter l’aventure ; mais la raison, plus encore que le devoir, le dissuadait. Avait-il le droit, lui général, à qui une mission si importante, la vie de tant de braves, étaient confiées, de se livrer aux caprices d’une femme ? Et si le cœur de la guerrière était cuirassé de fer comme sa poitrine ? Si elle l’attirait dans un piège pour se venger de l’homme, aimé jadis, et aujourd’hui haï à un degré égal ?

— Non, lui criait une voix, Marie est incapable d’une trahison aussi vile. D’ailleurs, si elle ne l’aimait plus, que lui importait la vie ? Maintenant qu’il l’avait revue, qu’il s’était enivré de sa beauté et pénétré de la noblesse de son être, l’existence loin d’elle lui paraissait sans valeur.

Dix heures sonnaient à la tour de Murany. Wesseleny appela son fidèle Benjo, lui communiqua la lettre et, non sans hésitation, lui révéla son intention de se rendre à l’appel.