mier, se méprenant par modestie sur la réponse de Nadège ; nous avons tant d’ennemis ! tant de gredins qui nous rongent, nous torturent !
— Vous regrettez de ne pas savoir lire : vous avez raison, reprit Nadège. Faites étudier vos enfants. Des écoles pour vos fils, des écoles pour vos filles : voilà le salut, la victoire des pauvres et le rachat des riches. Avez-vous des enfants ?
— Le paysan hésita à répondre, puis lentement il dit :
— J’ai un fils, pour vous servir.
Il sembla que la voix de Gaskine faiblissait.
— Que fait-il ? demanda Nadège.
Le vieillard garda le silence.
— Votre fils cultive-t-il la terre ? Est-il soldat ?
Gaskine s’essuya le front avec sa manche ; il était rouge.
— Pourquoi ne me répondez-vous pas, mon ami ? Ne craignez pas de me dire tout. N’ayez pas de honte avec moi.
— C’est que je ne veux pas mentir, surtout à vous, et que je ne puis vous dire la vérité.
— La vérité ! c’est la devise de mon journal, et celle de mon cœur.
— Ah ! je n’ai pas su faire de mon fils ce que j’aurais voulu en faire. Il sait lire, lui, écrire ! Il écrit trop. Vous le connaissez peut-être.
— Alors, vous n’avez pas de raison pour me taire son nom.
— Une autre fois, si vous le permettez. Quand je