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Il consacre deux pièces assez obscures à un suicide (Mystère, 1832, Chute et pardon, 1833). On sait si le suicide fut à la mode vers 1835. Ces deux poèmes sont loin d’être sans valeur, le second surtout, qui raconte la malheureuse fin d’un artiste belge aujourd’hui bien oublié[1]. Tout un drame moral s’y laisse deviner, malheureusement retracé en termes trop généraux ou trop figurés, que les contemporains pénétrèrent assurément sans peine, mais qui nous semblent aujourd’hui assez vagues. Cependant, si le récit des faits, dans ce poème, manque de clarté, nous y trouvons, clairement dépeints, les tourments d’une âme généreuse, qui, dévastée par le doute, déçue dans ses nobles ambitions, découragée par l’indifférence ou la perfidie des hommes, cherche un refuge dans la mort. Il y a dans Chute et Pardon beaucoup de chattertonisme.

En somme, l’auteur de ces divers poèmes se dit revenu de tout, de l’amour, de la foi, de la pensée, du rêve, de l’action, et incline vers un sombre nihilisme. Ailleurs il exhale une mélancolie vague et sans objet précis, qui semble être d’origine lamartinienne.

Ce siècle que devait naguère illustrer le triomphe du saint-simonisme, n’est plus désormais pour lui qu’un siècle de « barbarie civilisée », qui, rompant

  1. Chute et pardon parut d’abord en plaquette sous un autre titre : Le Suicide. Aux mânes du jeune Van Beveren. Liège, impr. Morel, 1833, in-8o, 15 p. signé in fine.