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esprit, avec mélancolie, ces glorieuses journées qui ont valu à la Belgique son indépendance :

Je crois entendre encor gronder par intervalle

L’écho sourd du canon dont la voix triomphale

xxxxNous annonça des jours nouveaux.

Il s’adresse alors « à la statue de la patrie », qui décore le tombeau des « martyrs. »

Elle est de Geefs et nous la trouvons aujourd’hui assez médiocre, mais un homme de 1830 ne pouvait la voir avec nos yeux.

Le peuple peut enfin, du haut de sa victoire,

T’admirer, ô statue, à la face du ciel ;
Il peut montrer à tous, quand son honneur l’ordonne,
Ton socle de granit, plus élevé qu’un trône,

xxxxPresque aussi sacré qu’un autel.

Le « grand statuaire » dont elle est l’œuvre, « arrêtant son génie au milieu de son libre essor, » pour obéir aux scrupules pudibonds « d’un homme alors puissant, »[1] a représenté la noble figure le sein voilé. Que ne lui a-t-il plutôt voilé les yeux ! Il aurait épargné à la Patrie le spectacle de nos « tristes débats » et de nos « actions honteuses. » Et le poète, précisant ses accusations, énumère les maux qui, selon

  1. J’ai découvert que cet « homme puissant » était un fonctionnaire appelé Dugniolle. V. De Bruxelles à Constantinople, par un Touriste flamand, tome I, p. 116.