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l’année j’expédierai à de courts intervalles : je ne veux pas renvoyée Claude sans compagnie. Il n’est pas séant que celui qui naguère voyait tant de milliers d’hommes lui faire cortège en avant et en arrière, se trouve tout à coup abandonné à lui seul. Il se contentera, faute de mieux, de ces deux compagnons. »

IV. Elle dit : et d’un tour fait sur un vil fuseau,
Du stupide mortel abrégeant l’agonie,
Elle tranche le cours de sa royale vie.
A l’instant Lachésis, une de ses deux sœurs,
Dans un habit paré de festons et de fleurs,
Et le front couronné des lauriers du Permesse,
D’une toison d’argent tire une blanche tresse
Dont son adroite main forme un fil délicat.
Le fil sur le fuseau prend un nouvel éclat.
» De sa rare beauté les sœurs sont étonnées ;
Et toutes à l’envi de guirlandes ornées,
Voyant briller leur laine et s’enrichir encor,
Avec un fil doré tissent le siècle d’or.
De la blanche toison la laine détachée,
Et de leurs doigts légers rapidement touchée,
Coule à l’instant sans peine, et file et s’embellit ;
De mille et mille tours le fuseau se remplit.
Qu’il passe les longs jours et la trame fertile
Du rival de Céphale et du vieux roi de Pyle !
Phœbus, d’un chant de joie annonçant l’avenir,
De fuseaux toujours neufs s’empresse à les servir,
Et cherchant sur sa lyre un ton qui les séduise,
Les trompe heureusement sur le temps qui s’épuise.
« Puisse un si doux travail, dit-il, être éternel !