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LIVRE VII.

bile astrologue, diffèrent entre eux sur ce même sujet. Selon Apollonius, les comètes sont mises par les Chaldéens au nombre des étoiles errantes, et ils connaissent leur cours ; Épigène, au contraire, dit qu’ils n’ont rien de positif sur les comètes, mais qu’ils les prennent pour des corps qu’enflamme un tourbillon d’air violemment roulé sur lui-même.

IV. Commençons, si tu le veux bien, par exposer le système d’Épigène et par le réfuter. Saturne est, selon lui, la planète qui influe le plus sur tous les mouvements des corps célestes. « Lorsqu’il pèse sur les signes voisins de Mars, ou qu’il entre dans le voisinage de la lune, ou en conjonction avec le soleil, sa nature froide et orageuse condense l’air et le roule en globe sur plusieurs points ; s’il absorbe ensuite les rayons solaires, le tonnerre gronde et l’éclair luit. Si Mars concourt à son action, la foudre éclate. Outre cela, dit-il, les éléments de la foudre ne sont pas les mêmes que ceux des éclairs : l’évaporation des eaux et de tous les corps humides ne produit dans le ciel que ces lueurs qui menacent sans frapper ; mais plus chaudes et plus sèches, les exhalaisons de la terre font jaillir la foudre. Les poutres, les torches, qui ne diffèrent entre elles que par le volume, ne se forment pas autrement. Lorsqu’un de ces globes d’air que nous appelons trombes s’est chargé de particules humides et terreuses, quelque part qu’il se porte, il offre l’aspect d’un feu dilaté, et dure autant que subsiste cette masse d’air saturée d’éléments humides et terreux. »

V. Réfutons d’abord la dernière de ces erreurs : il est faux que les poutres et les torches soient produites par des trombes. La trombe ne se forme et ne court que dans le voisinage de la terre : aussi la voit-on déraciner les arbustes et mettre à nu le sol partout où elle se jette, emportant quelquefois forêts et maisons ; presque toujours plus bas que les nuages, jamais du moins elle ne s’élève au-dessus. C’est dans une partie plus élevée du ciel que paraissent les poutres, et jamais on ne les voit entre la terre et les nuages. De plus, la trombe est toujours plus rapide que les nuages, et elle est lancée circulairement ; enfin, elle cesse brusquement et crève par sa violence même. Les poutres ne traversent pas le ciel d’un horizon à l'autre comme les torches ; elles stationnent et brillent toujours sur le même point. Charimandre, dans son Traité des comètes, dit qu’Anaxagore vit dans le ciel une lumière considérable et extraordinaire, de la dimension d’une grosse poutre, et qui dura plusieurs jours. Une flamme allongée, d’un aspect semblable, au rapport de Cal-