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LES VACANCES.

réchal de Ségur et qui m’a été racontée par son fils[1].

« Le maréchal, à peine remis d’une blessure affreuse reçue à la bataille de Laufeld, où il avait eu le bras emporté par un boulet de canon, quittait encore une fois la France pour retourner en Allemagne reprendre le commandement de sa division. Il voyageait lentement, comme on voyageait du temps de Louis XV ; les chemins étaient mauvais, on couchait toutes les nuits, et les auberges n’étaient pas belles, grandes et propres comme elles le sont aujourd’hui. Un orage affreux avait trempé hommes et chevaux, quand ils arrivèrent un soir dans un petit village où il n’y avait qu’une seule auberge de misérable apparence.

« Avez-vous de quoi nous loger, l’hôtesse, moi, mes gens et mes chevaux ? dit-il en entrant. — Ah ! monsieur, vous tombez mal : l’orage a effrayé les voyageurs : ma maison est pleine ; toutes mes chambres sont prises. Je ne pourrais loger que vos chevaux et vos gens. Ils coucheront ensemble sur la paille. — Mais je ne puis pourtant pas passer la nuit dehors, ma brave femme ! Voyez donc ; il pleut à torrents. Vous trouverez bien un coin à me donner. »

  1. Historique. (Note de l’auteur.)