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LES VACANCES.

fant ! Pour moi, cela m’était égal ; J’aimais mon père par-dessus tout ; avec lui j’étais heureux partout ; je n’avais que lui à aimer dans le monde.

SOPHIE

Est-ce que tu n’aimais pas les petits sauvages qui t’aimaient tant ?

PAUL.

Je les aimais bien, mais j’avais passé ces cinq années avec la pensée et l’espérance de les quitter ; et puis ils étaient plutôt mes esclaves que mes amis ; ils m’obéissaient comme des chiens et ne me commandaient jamais ; ils prenaient mes idées, ils ne me parlaient jamais des leurs ; en un mot, ils m’ennuyaient ; et pourtant je les ai regrettés ; leur chagrin quand je les ai quittés m’a fait de la peine. Tu vas voir cela tout à l’heure.

Mon père alla dire au roi que le chef blanc, son frère (le capitaine), demandait de l’eau, du poisson et des fruits. Le roi parut heureux de faire plaisir à mon père en donnant à son ami ce qu’il demandait. Les sauvages se mirent immédiatement les uns à cueillir des fruits du pays (il y en avait d’excellents et inconnus en Europe), d’autres à pêcher des poissons pour les saler et les conserver. On servit un repas auquel tout le monde prit part, et à la fin duquel mon père annonça au roi notre départ pour le lendemain. À cette nouvelle,